Communiqué de presse
Message du Président de la République Armen Sarkissian
Au début des années 1990, en raison de changements géopolitiques majeurs, notre peuple a eu la plus grande opportunité de créer son propre État indépendant. Notre mission n'était pas de remplacer un drapeau par un autre, mais de construire un pays qui assurerait à nouveau, des siècles plus tard, la sécurité, le progrès et la prospérité des Arméniens.
J'insiste sur le fait que la signification principale de l'existence d'un État indépendant est la capacité d'assumer et de porter des responsabilités lorsque nous réalisons que nous seuls, en tant que corps unique, sommes les bâtisseurs de nos victoires et les coupables de nos défaites.
Enthousiasmé par une telle opportunité historique, comme beaucoup de mes compatriotes, je me suis consacré à cette mission. Pour diverses raisons, l'activité de ma participation à différentes étapes a changé, mais je n'ai pas cessé de croire en notre succès national final. Et c'est ce qui m'a motivé à accepter la proposition de devenir président de l'Arménie.
Pour prendre cette décision importante, je me suis appuyé sur la proposition qui m'avait été faite, selon laquelle la nouvelle institution présidentielle disposerait d'outils et d'opportunités pour influencer la politique étrangère, l'économie, la politique d'investissement et les relations avec la diaspora, ainsi que pour promouvoir les intérêts nationaux sur la scène internationale et façonner un nouvel environnement scientifique et éducatif.
Quelque temps plus tard, les événements d'avril-mai 2018 ont eu lieu...
Une question peut se poser : pourquoi n'ai-je pas démissionné à ce moment-là ? La réponse est évidente, en raison de la responsabilité que j'ai prise en tant que président de la République. J'étais obligé de faire tout ce qui était en mon pouvoir pour éviter l'approfondissement de la division interne et d'éventuels affrontements, qui pourraient avoir des conséquences extrêmement négatives. J'ai également cherché à utiliser le prestige et les relations acquises par mon travail pendant de nombreuses années, ainsi que mon potentiel politico-économique international, pour construire un État fort et stable.
Une fois encore, on peut se demander pourquoi le président n'a pas réussi à influencer les événements politiques qui nous ont conduits à la crise nationale actuelle. La raison est à nouveau évidente : le manque d'outils appropriés dont dispose tout responsable d'État avec un seul document - la Constitution. Les racines de certains de nos problèmes importants sont cachées dans l'actuelle Loi fondamentale.
Nous sommes dans une situation paradoxale où le président doit être le garant de l'État sans disposer de véritables outils. La Constitution présuppose également la suprématie d'une institution sur une autre, crée des obstacles à la participation de spécialistes réputés de la diaspora à la gestion des institutions publiques dans leur patrie historique, etc.
Nous sommes une république parlementaire dans la forme, mais pas dans le fond. Le but de ma proposition n'était pas de passer d'une forme de gouvernement à une autre (parlementaire à semi-présidentielle ou présidentielle), mais de créer un système étatique basé sur des freins et contrepoids. Sans cela, il est difficile de parler de réalisations importantes, car le progrès et le succès ne peuvent être obtenus que dans les conditions d'un système prévisible et harmonieux.
Je suis heureux qu'une commission pour les amendements constitutionnels ait été mise en place, ce dont je remercie le gouvernement. J'espère qu'à terme les changements constitutionnels auront lieu, que le prochain président et l'institution présidentielle pourront travailler dans un environnement plus équilibré et coordonné.
Nous vivons dans une réalité unique, une réalité où le Président ne peut pas influencer les questions de guerre ou de paix.
Une réalité, où il ne peut pas opposer son veto aux lois qu'il juge inopportunes pour l'État et le peuple.
Une réalité, où les opportunités du Président sont perçues non pas comme un avantage pour l'État, mais comme une menace par divers groupes politiques.
Une réalité où le Président est incapable d'utiliser la majeure partie de son potentiel pour résoudre les problèmes systémiques de politique intérieure et extérieure.
Une réalité où le monde est dans une zone de turbulence constante, mais où le Président ne dispose pas d'un outil constitutionnel pour aider son pays.
Une réalité où le chef de l'État et parfois sa famille sont la cible de divers groupes politiques. Ils ne s'intéressent pas tant aux réalisations de l'institution présidentielle au profit du pays, qu'à mon passé, aux diverses théories du complot, et aux mythes. Cette "préoccupation" pour moi va au-delà de la moralité et finit par affecter directement ma santé.
J'ai longuement réfléchi et j'ai décidé de démissionner du poste de Président de la République après avoir travaillé activement pendant environ quatre ans.
Cette décision n'est pas du tout émotionnelle, et elle suit une certaine logique.
En ces temps difficiles pour le pays et la nation, le Président ne dispose pas des outils nécessaires pour influencer les processus radicaux de la politique intérieure et extérieure.
En cette période difficile pour notre État, où l'unité nationale est nécessaire, l'institution présidentielle ne doit pas être la cible de ragots et de théories du complot, détournant ainsi l'attention du public des questions les plus importantes.
Nous n'avons plus le droit à l'erreur !
Pour finir, je voudrais exprimer ma gratitude particulière à nos citoyens, à nos compatriotes de la diaspora, pour leur persévérance, leur endurance, leur patience et leur courage en ces temps difficiles pour le pays.
Je remercie tout particulièrement les soldats et les officiers de notre courageuse armée. Je rends hommage aux familles des héros qui ont sacrifié leur vie pour notre patrie.
Je remercie également tous les employés de la Présidence de la République et mes collègues des structures étatiques pour un travail commun efficace.